lundi 24 décembre 2012

Auguri!

Καλές γιορτές σε όλους!


mardi 13 novembre 2012

Le Grec, nouveau lépreux?

Depuis le début de la crise, plusieurs dizaines de milliers de Grecs ont quitté leur pays. Quatre décennies après la dictature des Colonels, les Grecs sont de nouveau poussés à l'exode. L'Allemagne constitue pour la majorité d'entre eux une destination de choix, suivie de près par le Royaume-Uni. D'autres mettent le cap sur la France. Ce fut le cas d'un couple d'amis, Yorgos et Anna*. Issus de milieux francophiles, le choix de la France comme terre d'expatriation s'était imposé à eux. Amoureux de la France, volontaires et plein d'allant, ils posèrent donc leurs valises dans mon pays de naissance. Yorgos trouva rapidement un emploi bien rémunéré, ce qui devait faciliter leurs recherches de logement. D'autant qu'ils se trouvaient dans une ville de province, loin de Paris et de ses 100 candidats pour un logement. C'est pourtant désemparée qu'Anna me contacta un soir. Elle ne comprenait pas pourquoi disposant de revenus huit fois supérieurs aux loyers demandés, ils n'étaient éligibles pour aucun appartement, se faisant systématiquement refouler des agences immobilières. Au bout de plusieurs semaines, ils purent enfin visiter un petit appartement mis en location par des particuliers et leur dossier fut retenu. Pour obtenir les clefs, il ne leur manquait plus qu'un contrat d'assurance habitation. Une formalité. Ou pas. Le premier assureur exigeait une longue liste de justificatifs assez inédits ainsi que les bulletins de salaire et l'avis d'imposition de leurs garants. Compte tenu des délais de traduction, le logement allait leur filer sous le nez. Le second assureur acceptait de les assurer à condition qu'ils hypothèquent leur logement d'Athènes. Dans une impasse, abattus et choqués, Yorgos et Anna refirent leurs valises, direction la Grèce.
Durant leur séjour en France, rien ne leur fut épargné. En 2012, en France, le Grec semble être le nouveau lépreux, enfin certainement un vandale et assurément un voleur. Après tout, c'est la télévision qui le dit... Quand les médias salissent sans discernement un peuple, il ne faut pas s'étonner de pareilles réactions chez le Français moyen, malheureusement plus souvent médiocre que moyen, convaincu en toute occasion de sa supériorité qu'il est, du reste, le seul à percevoir. (Il suffit de quelques expériences de vie à l'étranger pour se rendre compte que l'arrogance dont fait régulièrement preuve le citoyen français vis-à-vis d'autrui en dehors du territoire national ne révèle qu'un sérieux manque d'éducation et de lucidité. Mais cela est un autre débat.)
En 2006, mon meilleur ami grec avait obtenu un poste de chercheur en France. Pour se trouver un toit, il avait suivi le même parcours que Yorgos et Anna, à quelques détails près. Agences comme particuliers l'avaient cordialement accueilli. Chacun de ses coups de fil avait abouti à une visite. En quelques jours, il avait trouvé un appartement. Quant à la question de l'assurance habitation, elle avait été réglée en une dizaine de minutes. Dimitris s'était attiré la sympathie et la curiosité des Français qui l'avaient tout de suite adopté. A l'époque, le Grec jouissait d'une cote certaine. L'effet Nikos Aliagas? Pourquoi pas, quand la seule fenêtre sur le monde est la télévision, elle peut dans un sens comme dans un autre formater les esprits.
En 2012, la donne a changé. Un gouffre sépare ces deux expériences. Pourtant, le profil des personnes rencontrées par Yorgos, Anna et Dimitris était sensiblement le même: des individus ne connaissant la Grèce que de nom, la situant vaguement sur une carte, n'ayant jamais rencontré de Grecs auparavant, n'ayant donc a priori aucune raison de les aimer ou de leur en vouloir.
Je ne peux m'empêcher de faire le lien entre la propagande nauséabonde dont les Grecs furent l'objet dans les médias français ces dernières années et l'accueil qui fut réservé à mes amis. En 2006, le Grec est sympa, c'est presque une mascotte. En 2012, c'est potentiellement un brigand. Ah qu'il est facile de faire gober n'importe quoi aux pauvres esprits qui n'iront jamais plus loin que leur barrière, ne remettront jamais en question l'os rance qu'on leur donne à mâchouiller pour les occuper, avaleront goulûment tous les préjugés dont on les abreuve, et qui suivant les périodes auront donc toujours le mépris facile (et la langue bien pendue) pour tel ou tel groupe d'individus! Pour en avoir été témoin, je me suis rendu compte que mépriser le Grec en public n'est pas un acte honteux. Encouragés par les médias, convaincus durs comme fer que le Grec est un être vil, les réflexions racistes ne se cachent plus. Si salir un pays que l'on ne connaît pas n'est pas bien difficile, rétablir un semblant de vérité est nettement plus complexe. Face à la télévision, mes 10 ans d'expatriation en Grèce équivalent à 10 ans de claquettes sur la banquise. Ma connaissance intime de ce pays, ma maîtrise de la langue, mes séjours fréquents à Athènes pour raisons professionnelles et mes contacts quotidiens avec des Grecs ne sont rien face à une voix-off accolée à des images de Reuters. La description de scènes vécues lors d'un séjour prolongé à Athènes ne recueille que des moues dubitatives, voire des "à la télé, ils ne disent pas comme toi." Pour le Français moyen, le Grec est un voleur, point barre. Et s'il meurt de faim, ce n'est que justice. Après tout, il n'avait qu'à payer ses impôts. Alors, le ventre replet et la bouche pleine, sur une petite chorégraphie parachevant un spectacle aussi grotesque qu'obscène, on peut se moquer du Grec. Il est là pour ça, n'est-ce pas? Depuis trois ans, on assiste à l'exécution en règle d'un pays, on peut bien cracher sur ses ressortissants. C'est permis. Pour citer Ted Stanger, "l'individu le moins diplômé, le plus nul dans son travail, la risée de ses pairs" tirera toujours un plaisir extrême à fouler qui est déjà à terre, et n'aura alors pas grande difficulté à éprouver un quelconque sentiment de supériorité.
Yorgos et Anna, en dépit des tourments qui frappent leur pays, essaient de se reconstruire et d'oublier leur tentative d'expatriation avortée. Après un mois et demi passé en France où ils ont subi de nombreux outrages, ils avaient presque oublié ce que c'était que de vivre au milieu de gens souriants, ouverts et affables.
Les atermoiements autour du versement d'une nouvelle tranche d'aide ne risquent pas d'améliorer le sort des Grecs. On a tranché dans les salaires, les retraites, supprimé les primes, diminué les allocations, augmenté les impôts, créé d'autres impôts. Les charges des Grecs ont été démultipliées tandis que leurs ressources ont été tailladées. Il devient difficile de se soigner, à moins de faire la queue des heures durant devant plusieurs pharmacies. De toute façon, certains médicaments, notamment ceux contre le cancer, sont introuvables. D'autres sont fournis par des associations de Grecs des Etats-Unis et de Russie.
Ajoutez à cela une bonne dose d'insécurité, des agressions sauvages pour arracher des croix de baptêmes, des meurtres à l'arme blanche d'une boucherie inouïe dont le compte-rendu ferait vomir n'importe quel lecteur de Libération ou du Figaro. Des quartiers d'Athènes où il ne fait plus bon se promener lorsque l'on est une femme. Un comble pour la Grèce, pays de la féminité valorisée et exarcerbée, où la femme n'a pas à se masculiniser pour exister. J'ai récemment recueilli une touriste taïwanaise en pleurs, qui s'est accrochée à mon bras, terrorisée par ces hommes aux regards hallucinés agglutinés sur les trottoirs: "They look so mean". J'avoue que je n'étais pas très rassurée non plus et que cette rencontre était providentielle. Nous n'étions pourtant qu'à quelques encablures de la rue Athinas. Ghettoïsation d'une capitale associée à un retour massif vers les campagnes et les îles, appauvrissement, faim, manque de soins, le Grec est dans l'impasse.
Certains n'excluent plus un coup d'Etat. Faut-il en arriver là pour réveiller les consciences? L'avenir le dira.

* Les prénoms ont été modifiés.

mardi 21 février 2012

Appelez-moi Mademoiselle!

Ce titre charmant, pour moi symbole de jeunesse (éternelle), de grâce et d'élégance, va donc disparaître des documents administratifs français au profit du terne "Madame".
Sur les formulaires, nous ne serons plus toutes que des "Madame", quelle tristesse!
Je me souviens qu'à Rennes 2, en me remettant mon diplôme, la secrétaire était très gênée car y figurait le titre de "Madame" au lieu de l'habituel "Mademoiselle". Nous avions été nombreuses à nous en émouvoir.
Heureusement, la dictature du politiquement correct se limite ici aux documents administratifs. Dieu merci, personne n'a encore exigé que le terme "Mademoiselle" ne soit retiré des dictionnaires!
Imaginez un peu Coco Mademoiselle rebaptisé Coco Madame! Aurait-il le même succès auprès des jeunes femmes?
Messieurs, je vous invite à continuer de nous appeler ainsi, et sans retenue s'il vous plait, c'est tellement plus agréable!

dimanche 19 février 2012

Trop, c'est trop

J’ai décidé de ne plus évoquer la situation de la Grèce avec toute personne qui ne parle pas le grec, n’a jamais vécu en Grèce (en effet, je considère qu’un lâcher de touristes de 2 heures dans les échoppes de Plaka ne permet pas de faire le tour de la question grecque), voire ne sait pas situer la Grèce sur une carte.
Les efforts conjugués de nombreux journalistes français et européens pour instiller la haine des Grecs et de la Grèce chez le téléspectateur ou lecteur moyen ont payé. N’attendez donc aucune empathie de leur part. Quand naïvement, vous tentez d’expliquer les violences de ces derniers mois avec en point d’orgue celles de dimanche dernier par un "Les Grecs ont faim", on vous répond invariablement "Mais ils sont fainéants!"
Je déplore qu’aucune chaîne de télévision n’ait jamais jugé utile d’envoyer de correspondant permanent à Athènes, à l’image d’un Maurice Ollivari à Rome, par exemple, qui en plus de nous présenter des reportages liés à des événements de premier plan, nous fait régulièrement partager des tranches de vie pour nous rendre les Italiens un peu moins étrangers. Quelqu’un qui connaîtrait la Grèce de l’intérieur plutôt que d’être dépêché au dernier moment quand cela chauffe, et qui se mêlerait à la foule plutôt que de filmer ses interventions sur son balcon du Grande-Bretagne (palace local). La Grèce, ce "pays mineur" de l’Union européenne du point de vue de nos grands yeux nombrilistes, se trouve pourtant au cœur de l’actualité depuis plusieurs années et je note qu’aucun journaliste ne semble à la hauteur pour rendre compte aux ignorants assis devant leur petite lucarne de la réalité grecque.  
Quand les esprits s'apaisent au cours d'une discussion forcément très animée et que l'on peut placer quelques informations recueillies sur Skype auprès de ses amis grecs et/ou dans la presse grecque [en pagaille (liste non exhaustive) : Les orphelinats font le plein car les parents n’ont plus de quoi nourrir leurs enfants, 50% des jeunes sont au chômage, 1000 nouveaux chômeurs par jour, la Grèce a désormais le même niveau de vie que la Bulgarie, sur une population comptant moins de 11 millions d'habitants, 6,6 millions de Grecs vivent en-dessous du seuil de pauvreté, un pope a collecté 15 tonnes de vivres pour les distribuer aux nécessiteux (nécessiteux : individu occupant un emploi rémunéré ou non ou étant au chômage, voire à la rue, depuis peu), 40% des SDF travaillent, d’ailleurs, maintenant, même de petites mamies grecques se retrouvent à la rue (c’est un phénomène nouveau en Grèce, personnellement, jusqu’en 2008, je n’avais jamais vu de SDF en Grèce), les premiers immigrants (en majorité des Albanais) quittent le pays, beaucoup de Grecs sont candidats à l’exil ("Je cherche du travail partout, même en Pologne. C’est bien la Pologne à côté de ce qu’est devenue la Grèce… "), "la Grèce a fait un bond en arrière de 40 ans" etc.], on me rétorque "Oui, mais la France envoie beaucoup d’argent à la Grèce" (saint Portefeuille, priez pour nous et infligez les pires châtiments à ces paresseux de Grecs sans cesse montrés du doigt au journal télévisé.) Effectivement, mais à quel prix? L’Union européenne s’emploie à sauver la Grèce, malheureusement, il semble que le remède soit pire que le mal. J’ai parfois l’impression que l’Union européenne joue au petit pont massacreur avec la Grèce. Un territoire entièrement ligué contre un petit pays que personne ne connaît et dont fort peu d'individus parlent la langue, un territoire avec des idées bien arrêtées mais peu enclin à se remettre en question face à l’échec cuisant et patent du sauvetage grec entrepris jusqu’ici. Cela me fera une belle jambe, en tant que Française, d’apprendre un jour que la Grèce a été sauvée, si en contrepartie la population qui n’a pas opté pour l’exil a été décimée par la faim ou le désespoir. Je n’approuve pas l’orientation qui a été choisie pour "sauver" (synonymes : couler, enfoncer, détruire, annihiler, éradiquer, abattre) la Grèce, loin s’en faut. L’Union européenne agit à mes yeux tel un pompier pyromane et les conséquences de cet incendie non maîtrisé sont plus pernicieuses que celles des incendies de dimanche dernier, car n’étant pas spectaculaires, elles passent inaperçues.
L’Union européenne m’a beaucoup apporté: j’ai passé un an à Thessalonique grâce au programme Socrates, je suis ravie de ne plus fréquenter les bureaux de change lorsque je voyage dans l’espace européen, sans compter que dans mon métier de traductrice, la monnaie unique m’ouvre plus de portes et facilite grandement les échanges. Il est indéniable que ma vie, privée ou professionnelle, est indissociable de l’Union européenne et je ne voudrais pour rien au monde revenir en arrière. 
Néanmoins, au vu des souffrances endurées par les Grecs (qui paient un lourd tribut à l'incurie pérenne de leur classe dirigeante), j'éprouve, en tant qu'européenne, un sentiment de honte qui va croissant.
Καλό βράδυ σε όλους

mardi 3 janvier 2012

Auguri!

Je vous souhaite une très bonne année 2012!